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mercredi 27 juillet 2011

Tour de l'Oisans et des Ecrins 2011 en Non Stop

Bonjour à tous,

Pour mes 40 ans, âge charnière (mid-term) mais aussi âge du changement de catégorie puisque je deviens tout jeune V1H, je m’étais fixé comme objectif de finir une course mythique : l’UTMB.
Grosse désillusion en janvier quand j’apprends que je ne suis pas tiré au sort. Le TOE, qui était initialement une course d’entraînement se transforme en objectif principal.

Le Tour de l’Oisans et des Ecrins c’est : 185 km et D+12000m



Les barrières étant très larges, je me fixe comme objectif unique de finir quelque soit le temps et le classement. Deux grosses désillusions me restent encore en travers de la gorge : mon abandon à la CCC en 2010 et mon abandon au Grand Duc en 2011. Les raisons sont différentes mais avec du recul, je n’avais pas de raison physique majeure d’abandonner !!

Le décor étant posé, me voilà lancé dans cette aventure. Néanmoins, je ne pars pas vers l’inconnu. Le fait d’avoir déjà fait le parcours une fois est un avantage énorme par rapport à ceux qui vont le découvrir pour la première fois.

Les 4 jours passés dans les Vosges m’ont été très bénéfiques puisqu’ils m’ont permis de :
  • Me rassurer sur l’usage du GPS et de son intérêt
  • De valider mon équipement : sac à dos et veste de pluie
  • De prendre conscience de mon état de forme actuel
  • De valider les Tecnica Diablo par temps de pluie
Les erreurs de la CCC et du  Grand Duc m’ont également fait prendre conscience de l’importance du choix des chaussures (vs météo) et des bâtons (fini les Trail Pole de Raidlight ou Xenon Camp très légers mais trop fragiles).

Les prévisions météo étant plutôt pessimistes, j’opte pour les chaussures Technica Diablo, bon compromis amorti et accroche. Pour les bâtons, je choisis les LEKI carbone trois brins que je règle et serre dès le départ. Je les porterai tout le long sans gêne (sauf lorsque je devais tenir également le GPS).

Pour la frontale, je reprends ma Frendo Sun (30€) et trois jeux de piles AAA au lithium. Ces dernières sont recommandées pour le poids et la meilleure tenue au froid que des alcalines traditionnelles. Un frontale de secours PETZL indispensable en cas de panne de la première mais surtout pour changer les piles de la frontale principale en pleine nuit !!!

Pour le GPS, c’est le SPORTIVA de CompGPS. J’ai acheté une batterie supplémentaire, ce qui devait porter l’autonomie à 12h+12h=24h, donc hors de question de le laisser allumer tout le long. Le parcours GPS et les cartes au 1/25000 chargés. Deux autres batteries étaient en commande mais ne sont pas arrivées à temps.

J’ai pris également ma montre Forerunner 310 XT, mais sont autonomie est également limitée, 18 heures. J’y ai également chargé les parcours GPS au cas où.

Pour la nourriture, rien de spécial. Les ravitos sont nombreux et dans les bases de vie, pâtes et soupes chaudes étaient annoncées. Gels et barres sont prévus  + un gâteau sport chocolat coupé en morceaux, une moitié avec moi dès le départ et le reste dans le sac pour la deuxième base de vie.

Mardi, départ de Lyon vers 15h30 pour les 2 Alpes. Arrivée aux 2 Alpes, à la salle Amphibia, je croise tout de suite Claude M. qui venait également d’arriver. On récupère nos dossards, les consignes + la tige de Cyalume (barre qui devient luminescente jaune pendant 12 heures environ dès qu’on la brise).

On récupère également les 4 sacs permettant de laisser les affaires aux 4 bases de vie : Monetier les Bains (65 km), Vallouise (83 km), La Chapelle en Valgaudemar (km 133), Valsenestre (km 165).


Je décide de ne laisser des affaires qu’à Vallouise et La Chapelle :
  • Vallouise, parce que cette base se situe juste avant une grosse difficulté (étape de plus de 50 km avec plusieurs cols à plus de 2600m dont le col de l’Aup Martin), normalement je devrais y être juste avant la nuit et ce sera le moment de me changer pour le froid. Gants chauds, bonnet, bas long, haut long et chaud.
  • La Chapelle, parce que c’est la dernière ligne droite et je devrais y être le matin, moment pour y laisser mes affaires de nuit et repartir léger pour la dernière partie.
A chaque fois je laisse également, slip, chaussette, …crème pour les pieds, gels + une gourde remplit de poudre Isotar Endurance. Avec du recul, une autre paire de chaussures n’aurait pas été de trop.
Je dépose les sacs, et je me rends au briefing. Arnaud Mantoux, notre GO, est toujours aussi encourageant et atypique. Après une revue des forces en présence, i.e. les potentiels vainqueurs, il présente le parcours, rapidement en insistant juste sur certains passages qui ont changé du fait de travaux sur les pistes de ski. Il averti que suivre les marques du GR54 n’est pas toujours trivial, que le roadbook et le gps sont obligatoires. Que sur le TOE, on n’abandonne pas mais que si 50% des coureurs arrivent à terminer, il sera content J ?! Que la météo du mercredi annonce de la pluie mais que la nuit sera « séche » et le jeudi plus clément.

On se quitte sur ces bonnes paroles et rdv le lendemain à 7h45 pour le briefing post départ. On récupère les clés de la chambre – Hôtel Carlina. Pour le petit dèj, vu qu’il ne sera servi qu’à partir de 7h30, la charmante tenancière nous propose de nous monter un plateau dès la veille avec le café en thermos. Je me renseigne pour savoir si jamais j’arrive jeudi soir dans la nuit, si je peux réserver une chambre. Vu le taux de réservation faible de l’hôtel représentatif de la station, c’est possible mais il faut appeler avant 19h00 le jour même. J’enregistre le n° de l’hôtel au cas où.

Avec Claude, on part à la quête d’un resto qui fait des pâtes sur la station. Après quelques errements, on trouve finalement notre bonheur.

Réveil à 6h45, petit déj (le café est froid !!), on peaufine le sac, et premier accro, le GPS c’est mis en marche toute la nuit dans le sac, la batterie n’affiche plus que 30%. L’autonomie totale avec les 2 batteries tombe à moins de 15h maintenant, va falloir économiser. J’accroche à ma ceinture élastique : dossard + sacs déchets + petit filet dans lequel je glisse mon gobelet pliant.

C’est parti pour rejoindre le départ via la voiture où je laisser mes affaires.
On se fait bipper, dernier briefing hyper court, rien de neuf et la météo n’a pas évolué sensiblement. De nombreux coureurs sont venus en famille et on aurait pu se croire à un départ d’appelés partant au front. Je décide de ne pas allumer ni GPS ni montre : économiser les batteries et voir la course un peu différemment (finalement j'allumerai ma montre qu'à Valsenestre, soit 20 km avant l'arrivée et le GPS que 2 fois ponctuellement).
8h00, c’est parti dans la joie et l’euphorie traditionnelles de ce type de course.

Et oui c’est Claude !!!

Cela commence doucement par une traversée des 2 Alpes, une descente (D-700m) sur le Freney en Oisans (km 5) puis une montée (D+ 900m) jusqu’au col de Cluy (km 12). Dans la première descente, sur un passage herbeux et humide, je me retrouve sur les fesses sans mal. Il semble que mon sac à dos ait modifié mon centre de gravité vers l’arrière, une correction de posture vers l’avant s’impose pour la suite.
Durant cette première montée, on alterne marche et trottinage. Je me retrouve avec une petite traileuse toute menue (pas de mollets !!) et je me demande ce qu’elle fait dans cette galère. Nos chemins se croiseront souvent, jusqu’à Vallouise. Elle finira première féminine et 20ème au scratch !!!  (elle a fini 1ère à la TransJu cette année). Il s’agit de Séverine Vandermeulen. A la différence de moi, elle est restée sur le même rythme tout le long et finira 11H30 avant moi.

Barrage du Chambon vu depuis la montée du Col de Cluy.

Après ce premier col, suit un deuxième (col de Sarenne, alt. 1997m) avec une partie sur route où l’on croise une voiture de la course et un cycliste esseulé. Suit ensuite une descente assez raide puis une remontée sur le plateau d’Emparis (D+ 850m) via le deuxième ravito à Besse en Oisans (km 25).

Besses en Oisans

La montée au plateau est longue mais régulière. Je rattrape « Séverine » sur la fin de la montée. On attaque le plateau d’Emparis ensemble, la pluie commence à tomber mais je ne sors pas encore la veste. Je prends les devants sur cette partie roulante et rattrape quelques coureurs.

Plateau d’Emparis

Le plateau se termine au col du Souchet (alt 2370m – km 33). La descente sur La Grave est longue et, compte tenu des travaux et la pluie, devient pas très agréable et glissante. Arrivée à Le Chazelet, un petit village juste avant La Grave, je décide de sortir la veste de pluie. J’y croise un coureur du TOE 2010, Romain, qui habite et travaille ici, circulant avec sa voiture du boulot. On échange quelques mots. La pluie augmente en ardeur et densité.
Arrivée à Les Terrasses (La Grave) (km 41 – alt 1492m), ravito salvateur et petit moment au sec. Au ravito, je ne traîne pas et repars rapidement, La descente jusqu’à La Grave est très glissante. Je me dis qu’on mon choix de chaussure a été judicieux. Avec des Hoka, ce passage serait devenu un calvaire.

Ensuite, c’est parti pour la remontée de la vallée vers le col d’Arsine. On longe dans un premier temps une rivière – La Romanche. On passe à côté de Villard d’Arène. Passage sympa sur single track. Sur cette partie, je me fait rattraper par la future deuxième féminine à 6 minutes seulement de Séverine : Irina Malejonock. On rejoint la route qui nous amène on fond de la vallée. Suit une première montée raide mais pas trop longue pour arriver sur un premier plateau.


Suit une montée continue avec un petit écart jusqu’au refuge de l’Alpe (km 52 – alt 2084m) que je croyais être un point de contrôle. Les gens nous proposent de rentrer s’abriter et prendre un thé chaud mais je préfère continuer et simplement remplir mon camel. La montée continue en faux plat qui est jamais facile à gérer doit-on courir, marcher ou alterner ? Finalement, je préfère marcher jusqu’au col d’Arsine (alt 2355 m - km 55) sachant que derrière, il y a une longue descente qui me donnera toute l’opportunité de courir.

Avant le col d’Arsine

Au col, je suis toujours avec Irina. On se fait contrôler et c’est parti pour une première partie de descente très roulante ou je déroule puis une deuxième un peu plus raide, ou je gère. Cette descente se fait le long d’un torrent (Le Petit Tabuc) bien chargée avec d’une couleur turquoise soutenue et puissante.

La descente roulante après le Col d’Arsine

Cette première partir de la descente se termine jusqu’à une magnifique retenue d’eau (Lac de la Douche) qui sert d’habitude de zone de baignade/pique-nique par beau temps. On rattrape dans cette partie Séverine, qui gère tranquillement sa descente. Je laisse filer Irina et reste avec Séverine. On finira la descente ensemble jusqu’à Le Casset (km 63 – alt. 1512m). De Le Casset à Monetier les Bains, un faux plat globalement descendant de 2 km environ.

Base de vie de Monetier Les Bains (km 65 – alt. 1473 m – 18h36 soit 10h36 de course)
N’ayant pas laissé de sac, je me contente de manger chaud : des pâtes et du jambon, de bien refaire le plein de gourde. On retrouve Irina.

Monetier – Vallouise
On part quasiment tous ensemble de Monetier vers 19h00 pour la longue montée jusqu’au col de l'Eychauda (alt. 2423m) (D+ 1000m). La montée est glissante par endroits mais régulière. Sur la fin, je ralentis légèrement et le groupe avec lequel j’étais s’éloigne légèrement mais avec le brouillard qui devient dense au col, disparaît rapidement de ma ligne de mire. Col de l'Eychauda (km 71), je gère la longue descente seule (D- 1250m). Elle est roulante dans l’ensemble mais je ne rattraperai finalement pas le groupe. La nuit commençant à tomber, je décide de sortir ma frontale. N’ayant pas de montre, je n’ai finalement aucune idée de l’heure qui l’est. Après quelques minutes d’adaptation à l’éclairage « frontal », la descente sur Vallouise continue, il faut être vigilant mais des flèches roses ont été bombées sur le sol lors des croisements critiques ce qui laisse peut de doute sur la route à suivre. Le finish se fait sur la route jusqu’à Vallouise, pas super agréable mais reposant à part les quelques voitures qui viennent plein phare en face.

Base de vie de Vallouise (km 83 – alt. 1167m – 22h31 soit 14h31 de course)
Je récupère mon sac, je me change complètement et mets ma tenue de nuit : collant long et chaud, gants chauds, maillot manche long type + veste de pluie + buff sur les oreilles + casquette (j’emmène avec moi les manchons Booster et le bonnet). Je regrette de ne pas avoir pris une paire de chaussures de rechange. En remettant des chaussures mouillées sur des chaussettes sèches, mes pieds baignent à nouveau rapidement dans le jus.
Je récupère également quelques gels et des morceaux de gâteaux sport que j’avais placé dans le sac.. Je mange un peu de pâte mais je n’ai pas grand appétit. Je remplis le camel rechargé en poudre Isostar « endurance ».
Je croise de nombreuses têtes connues sur cette base : Séverine repart lorsque j’arrive. Martinev (Martine Volay), une traileuse confirmée et kikoureuse qui était déjà arrivée et qui je pense aurait du jouer la victoire. Elle a une cheville en vrac mais va repartir avant moi et finir devant et troisième féminine en 46h28. Je croise également Georges G. que j’avais connue sur le TOE 2010 et croisé lors du Grand Duc 2011 à laquelle il a également abandonné cette année. Je retrouve également la deuxième féminine Irina.

Vallouise-La Chapelle en Valgaudemar
Je repars seul, il est 23h20. Une montée de près de D+ 1600m sur 19 km m’attend. La remise en jambe est difficile. Il y a une longue route goudronnée à remonter pour atteindre le fond de la vallée. La nuit est noire, pas d’éclairage public, une bruine brouille ma vue et le faisceau de ma frontale. Je me pose beaucoup de questions à ce moment là. Pas de lumière autour de moi, ni devant, ni derrière. Je sors le GPS, qui après 5 minutes pour trianguler ma position me confirme que je suis la bonne route. Je somnole a moitié ce qui n’aide pas à la motivation et au dynamisme. Je me rends compte que les piles de ma frontale son quasi-vide et que l’éclairage faible accentue ma somnolence et cette ambiance cotonneuse et bizarre (je me croyais dans Twin Peaks pour les connaisseurs). Au bout de cette route, un parking et une petite maison fermée. Je décide de m’asseoir sur une pierre et de changer les piles de ma frontale. D’où l’intérêt d’avoir une deuxième frontale d’appoint dans cette nuit noire. Deux coureurs me rejoignent et s’arrêtent à mes côtés. Que la lumière fût. Incroyable, le phare à pleine puissance, j’ai l’impression de me réveiller et je revis. On passe le pont pour attaquer la montée du col de l’Aup Martin (alt. 2761m), qui habituellement et vertigineuse mais qui de nuit va apparaître moins impressionnante.

Finish de la montée au Col de l’Aup Martin de plein jour. On devine à peine le GR.

Je monte tranquillement, et je m’octroie quelques pauses. Les quelques frontales au loin me montrent la distance qu’il me reste pour passer le col et celles plus bas, le chemin déjà réalisé. Arrivée en haut du col (km 102), je profite du vent frais pour me redonner du courage. Le col passé, suit un passage en faux plat et devers pour atteindre un deuxième col.

Suit ensuite une descente de D-800m jusqu’à Pré Chaumette (km 108 – alt. 1814m). Le jour commence à se lever doucement sur la fin de la descente. J’arrive au refuge de Pré Chaumette où il commence à installer le ravito à l’extérieur sur une table au soleil (les randonneurs commencent à se réveiller et réinvestissent la salle du petit dèj.). C’est une traileuse du Défi 2010 qui est bénévole sur le ravito. On échange quelques mots. Je ne traîne pas, remplis mon camel et c’est parti pour la montée au col de Valette (alt. 2680m), soit D+ 850m. La montée est plus minérale et on aperçoit clairement le col ce qui montre le chemin restant à parcourir. Au col de La Valette (km 112), on voit le suivant juste en face et pas très loin. La descente sinueuse dans le schiste est bien marquée et l’on découvre ces jolies courbes en se retournant en bas de la descente. Le soleil est maintenant haut. Un passage sur une plaine herbeuse où les rayons de soleil réchauffe le corps. Suit une deuxième montée en face de D+300m qui passe tranquillement. La suite est un passage en devers sur la partie droite qui nous fait passer de nombreuses ravines successives avant la montée vers le dernière col, Valllonpierre (alt. 2631) que l’on ne découvre qu’au dernier moment. Ce dernier passage est assez long avec un D+ de 600m. Je peine un peu, j’ai faim mais je n’arrive plus à manger du sucré qui me donne des nausées et renvois. Au col de Vallonpierre (km 116), je vois le lac et le refuge de Vallonpierre 300 m plus bas. Je descends tranquillement et décide de m’y arrêter pour manger un bout salé et chaud et boire un café.

Refuge de Vallonpierre (km 118 – alt.2271m – 9h00 environ) (http://www.vallonpierre.fr/)
J’espérais un bout de pizza ou un croque monsieur. Finalement, je craque pour une omelette complète : patates, lards et oignons ainsi qu’un grand café. Je ne mangerai que la moitié de l’omelette mais cela reste un délice.     Avec le café, j’ai l’impression de revivre. Je remplis mon camel et je repars après avoir réglé ma note et remercié la cuisinière. Une pause de 30 minutes max mais qui je pense a eu un effet certain au moins sur le moral.
Je repars tout revigorer pour la longue descente jusqu’à La Chapelle en Valgaudemar (alt. 1109 m). La descente et dans l’ensemble roulante et agréable. J’arrive à courir dès que possible et me sent bien. Un passage reposant pour cette matinée. La dernière partie se termine par 6 km environ de route (le parcours historique) alors que le GR54 passe juste en dessous au bord de la rivière. Il est quasiment midi et le soleil cogne. La route est chaude et dure, avec les chaussures et chaussettes mouillées, l’effet est terrible, j’ai l’impression que les les plantes des pieds cuisent au bain marie durant cette quasi heure passée à descendre cette route sans intérêt. De plus, mêmes les abords de cette route ne sont pas herbeux ce qui aurait permis de limiter les dégâts.

Base de vie de La Chapelle en Valgaudemar – km 133 - alt. 1109 m – 13h22 soit 29h32 de course.
Arrivée à la base, je récupère mon sac, et me change complètement. En enlevant mes chaussettes, je me rends compte que sous les pieds, quasiment toute  la peau est gonflée avec des poches d’eau !!! Il est maintenant trop tard, le mal est fait et je vais devoir gérer le reste de la course avec cet handicap. Du taboulet est proposé ce qui me fait un bien fou, j’en prends deux parts. Je me change à nouveau complètement mais voyant que je vais devoir faire une deuxième nuit et n’ayant pas laissé de sac à Valsenestre, je décide d’emmener avec mois gants chauds et buff. Je décide de mettre un corsaire et d’emmener mes Booster qui associés serviront d’équivalent long pour la nuit. Je change également les piles de ma frontale pour y mettre mon dernier jeu.
Sylvain Bazin, journaliste et traileur confirmé est également présent à cette base. On évoque l’idée de partir ensemble mais finalement, au moment de partir, je ne le trouve pas et je pars seul.

La Chapelle en Valgaudemar – Le Desert
Je pars de La Chapelle a 14h22, soit après un arrêt de près d’une heure. Le départ de la Chapelle se fait parallèle à la route et à la rivière en suivant le GR54. Les premières minutes sont horribles avec mes poches d’eau sous les pieds. Une fois la machine un peu chaude, je peux marcher à peu près normalement mais les quelques tentatives de courir sont restées vaines. Arrivée à Villar-Loubière, la montée commence vraiment. Elle se fait en deux parties : refuge des Souffles puis Col de Vaurze. Au début de la montée, je rattrape Sylvain qui monte doucement mais sûrement. Je décide de le suivre en me disant que de toute façon vu l’état de mes pieds, il ne sert à rien d’espérer quoi que ce soit et que le plus important maintenant est de finir dans les meilleures conditions possibles. On se prend une grosse averse lors de cette montée, veste de pluie de sortie. Quelques éclairs se font entendre ce qui ne présage rien de bon pour le passage du col. On se dit avec Sylvain que si la météo devient vraiment dangereuse, on se fera une halte au refuge des Souffles. Finalement, après s’être fait rincer pendant une petite heure, l’averse semble passer. Arrivée au refuge des Souffles (km 142 - alt. 1961m), on ne s’arrête pas et on poursuit le GR vers le col de Vaurze (alt. 2505). Ce dernier commence par une longue traversée avec des passages de ravines où des torrents gonflés par la pluie rendent le passage plus que dangereux. Pas de corde ou de filin pour se tenir, il faut sauter et espérer que l’appui qui suit est adhérent malgré la roche mouillée. On reste étonné que de tels passages soient si peu sécurisés sur un GR. Lors de cette traversée, j’ai senti, l’une après l’autre, mes poches d’eau éclater et tout le liquide se rependre dans ma chaussure. Au début, cela pique terriblement puis doucement, en continuant de marcher, la douleur s’estompe. Après une longue traversée, à moitié dans le brouillard, la vraie montée vers le col commence. Elle se fait en plusieurs phases. Au col, on voit on fond Le Desert et au loin le prochain col, Côte-Belle. La descente qui suit jusqu’à Le Desert est longue, difficile et pas du tout roulante à en devenir interminable. Avec Sylvain, on a un rythme quasi-similaire en descente. Sachant que la montée à Côte-Belle et la descente à suivre sont nettement plus agréables, je me console mentalement et me motive pour cette descente très technique et casse pattes. Au Désert (km 152 – alt. 1271m), un petit ravito d’appoint avec quelques trucs à manger et à boire. On n’y reste juste le temps de picorer, boire un peu et remplir les gourdes.

Le Desert - Valsenestre
C’est parti pour la montée de Côte-Belle, le soir tombe doucement. Après, un début très raide et direct, le GR devient progressif et régulier.

Montée de Côte-Belle

La montée se fait au début le long d’un lit de rivière pierreux dans lequel, avec du recul je crois voir des habitations de fortunes plus ou moins sophistiquées faites de pierre et de branches de bois avec des gens dedans qui nous regardent en se demandant ce que l’on fait là (on n’est pourtant pas les premiers à passer). La nuit commençant à tomber, je me demande toujours si c’était une hallucination ou si c’était réel. Avec du recul, je ne suis pas sur que ce que j’ai vu existait vraiment !!! (si jamais quelqu’un à vue la même chose que moi, merci de me faire un mail). J’ai même cherché sur internet pour voir si une communauté (secte) ne se serait pas installer dans ce lit de rivière. Il faut dire que durant cette deuxième nuit, j’ai vu un grand nombre de choses dans la montagne, surtout des gens qui au deuxième regard avaient disparus !! On m’avait parlé d’hallucination et je pense que c’était le cas !!! On sort nos frontales à la nuit tombée. La montée sur Côte-Belle se finit par des virages sinueux sur un sol glaiseux et lisse de toute pierre ou aspérité. Je me dis qu’on a de la chance de ne pas passer là par temps de pluie ou ce chemin doit devenir une vraie patinoire. Lors d’un virage, un tout droit nous a fait perdre 10 bonnes minutes en partant sur un autre chemin mais rien de grave.

Col de la Muzelle (à gauche – à côté de la petite dent) vu de Côte-Belle de plein jour

Au sommet, je me rends compte que mes piles sont déjà mortes et que la descente risque d’être quasi-impossible et dangereuse avec un si faible éclairage. Sylvain a par chance deux piles AAA au fond de sont sac (qui ne correspondent pas à sa frontale). Je remplace 2 des 3 piles et je revis. C’est parti pour la descente, longue, sinueuse mais peu technique. On passe à travers les cathédrales de schistes que l’on imagine à travers l’éclairage de nos frontales.

Descente de Côte-Belle de plein jour à travers les cristaux de schistes

La descente commence par une traversée interminable sans descendre vraiment et on se pose beaucoup de questions. Heureusement, je commence à entendre les grondements du torrent qui nous amènera sur Valsenestre, signe que l’on est plus vraiment loin. Après de nombreux virages, on déboule sur un chemin forestier en travaux qui malgré quelques doutes, débouche au bout de 500 m sur l’intersection entre le GR54 la route vers Valsenestre. Cet écart devra être fait en sens inverse pour repartir. La descente vers Valsenestre et pas très agréable. Sylvain à les plantes des pieds en compote (cf. son blog pour la photo du désastre), il n’arrive quasiment plus à marcher et ce chemin parsemé de points durs créés par les nombreux cailloux affleurants est un vrai calvaire. J’essaie de le motiver, des podologues sont normalement présents à Valsenestre. Au bout du chemin, des lueurs commencent à apparaître, on arrive enfin à cette base de vie.

Base de vie de Valsnestre – km 165 – 1h57 du matin soit 41h57 de course
Dans la salle de ravito, je croise quelques coureurs dont Georges G. Je quémande des piles AAA pour finir le dernier col. Il m’en passe 3 qui m’aideront bien.
Sylvain a enlevé ses chaussettes, c’est un massacre sous la plante des pieds : toute la peau est flétrie et ne semble plus faire partie du pied.
Pour ma part, je décide de me coucher 15 minutes dans un dortoir prévu à cet effet. J’enlève mes chaussures qui sont toujours détrempées et qui sentent horriblement. Je décide de les laisser dehors pour ne pas parfumer tout le dortoir. Sage décision pour les autres mais pas pour moi, j’ai oublié qu’il fait pas chaud. Mettre des chaussures mouillées c’est déjà pas très agréable, mettre des chaussures mouillées et très froides, c’est pire. Les chaussettes sont mouillées et je n’ai pas prévu de change à Valsenestre. La peau de mes pieds doit être dans un état proche de celle de Sylvain mais je préfère ne pas enlever mes chaussettes en me disant que l’on étudiera tout cela de près une fois franchie l’arrivée. Je sors mon téléphone pour faire sonner le réveil 15 minutes plus tard. Je m’endors au chaud et en chaussette mouillée. Le réveil sonne trop vite, je remets 15 minutes de plus. Le réveil sonne a nouveau, je l’éteins mais je m’endors à nouveau … je me réveille en sursaut, inquiet, il est quelle heure ?… j’ai dormi finalement 1 heure… ouf. Je me rhabille, récupère mes chaussures gelées et essaye de marcher tant bien que mal entre chaussettes mouilles, chaussures mouillées et gelées et plantes des pieds douloureuses. Je ne sers pas trop les chaussures.
Je retourne à la salle de ravito, mange un bout, remplit la gourde, mets les nouvelles piles dans la frontale. Je vais me faire bipper dans la salle de l’organisation. Ils ont une cheminée chargée de braise, je me pose à côté et boit un café chaud. Je fais un tour chez les podologues pour voir si Sylvain et encore là et dans quel état il se trouve. Il est allongé, ses pieds crémés de Nok mais pas encore en état de partir. Je lui souhaite bon courage se salue et je pars seul.

Valsenestre – Les 2 Alpes
Il est environ 3h30 du matin quand je repars.
Deux couples de coureurs étrangers partent en même temps que moi. Le jour va se lever dans 2h30 maxi et je sais que pour ce qui est de l’éclairage, je ne devrai plus avoir de soucis pour cette fin de course. La remontée vers le croisement avec le GR54 se fait tranquillement. Au croisement, la montée vers le col de la Muzelle commence. Mon rythme se situe entre celui des 2 couples. Le couple de devant me servant d’éclaireur ce qui m’a bien aidé. Le chemin est classique, sans difficulté majeure. Le jour se lève en plein milieu de la montée révélant un ciel bleu et un magnifique lit de nuage cotonneux dans la vallée.

La photo sert d’illustration mais ce n’est, en réalité, pas la bonne vallée !!!

On voit au loin Côte-Belle. La montée se finit à la lueur du jour. Le col de la Muzelle est magnifique, facilement localisable grâce à la petite dent rocheuse juste située juste à côté.


Lac et refuge de la Muzelle depuis la col.

Il s’agit maintenant de gérer la longue descente jusqu’à Bourg d’Arud (alt. 977m) soit près de D-1650m. Le début de la descente est difficile du fait de la pente et de l’état de mes pieds et de mes quadris douloureux. De plus, un de mes genoux commence à me faire mal et j’arrive à réduire la douleur en plaçant toujours la cheville vers l’extérieur (pas toujours facile suivant le sens du chemin et du devers. La pente diminue et le prochain obstacle est un névé important dans lequel le GR vient s’arrêter. Finalement, des pas de patineurs dans les traces déjà marquées ne sont pas si désagréables et je reste sur le névé le plus longtemps possible. On arrive au lac et au refuge de la Muzelle (alt. 2119 m – km 169). Une petite remontée de quelques mètres pour attaquer la dernière partie de la descente jusqu’à Venosc. J’enlève ma tenue de nuit et me mets à l’aise. Les premiers rayons de soleil sont revigorants. La descente est assez roulante malgré tout mais vu mon état je ne peux vraiment pas en profiter. Je cherche simplement à garder un rythme de marche rapide et éviter de poser ma plante de pieds sur un rocher pointu. La dernière partie se fait sur un chemin de type « route romaine » constitué de cailloux alignés tels des pavés parisiens mais en plus gros et plus irréguliers. Arrivée à Bourg d’Arud (km 174), une liaison sur route un peu longue nous conduit au ravito qui est localisé juste devant le départ des remontées mécaniques allant aux 2 Alpes. Je demande au bippeur si des tickets sont fournis par l’organisation mais pas de réponse positive. Je bois et mange mais je ne reste pas longtemps, il ne reste plus qu’une montée de D+600m, soit moins d’une heure de l’arrivée. La dernière montée, je la fais finalement à un bon rythme malgré le soleil qui bat son plein. A l’arrivée des cabines, il ne reste plus qu’à traverser les 2 alpes pour rejoindre l’arrivée. Je marche à bon rythme, je me retourne de temps en temps pour voir si un coureur ne reviendrait pas sur moi mais rien à l’horizon. Je marche, je marche, je croise des joggeurs, des skieurs, des VTTistes de descente, des golfeurs, des joueurs de Tennis, des marcheurs, des promeneurs … Plus que 200 mètres avant l’arrivée, je me retourne une dernière fois et je vois un coureur qui court vers moi assez vite !!! Je me mets à courir jusqu’à l’arrivée. Ce sera finalement qu’un joggeur parmi tant d’autres (ou encore une hallucination ?). L’arrivée en courant soulève toutefois quelques bravo des personnes présentent qui sont bienvenus.  Content d’en terminer en : 51h37’43’’, il est 11H40 du matin environ.

Je récupère un coupe-vent finisher que je pourrai arborer fièrement (à la différence de celui de la CCC).

Je retourne dans la salle Amphibia. On doit laisser ses chaussures à l’entrée. La phase de retrait des chaussures et très délicate et pénible. Je découvre deux nouvelles ampoules énormes sur le côté de chaque pied juste sous la malléole. Il semble que le fait de n’avoir pas beaucoup serré les chaussures ait entraîné des frottements supplémentaires. Je mange, bois tranquillement. Passe un coup de fil à la famille qui était déjà au courant grâce au suivi sur internet. Je retourne à la voiture afin de récupérer des affaires de change. Une douche salvatrice me revigore et me permet de voir l’état de mes pieds !!! va y avoir du boulot. Par contre, pas de podologue à l’arrivée !!! que des masseurs. Des lits de camps sont mis à dispo un peu à l’écart derrière des paravents.  Je m’octroie une sieste de 3h qui ne sera pas profonde mais tout de même réparatrice. Je pars à la quête des mes 2 sacs, je mettrai un bon 1/4h pour trouver le deuxième vu qu’il n’a pas été rangé au bonne endroit (je commençais à désespérer de ne pas le trouver et me voyais mal attendre les prochaines arrivages avant de rentrer). Je laisse un message à Claude pour lui dire que je suis bien arrivé et que j’ai bien récupéré mes sacs. Toujours pas de podologue, je décide de rentrer vers 17h00. De retour à la voiture, je perce mes énormes ampoules latérales, mets des sandales et je pars direct pour Lyon.

Bilan :
242 coureurs au départ, 169 coureurs à l'arrivée soit 70 % de finishers !!
Mon tableau des temps de passage :


Tous les résultats : solo

Un grand bravo aux 70 bénévoles qui ont fait don d’ubiquité.

P.S. N’ayant pas d’appareil photo, j’ai pioché sur différents sites. Toutes les photos sont liens vers leurs sites d'orgine. En espérant que les propriétaires ne m’en tiendront pas rigueur.

Liens vers les Suivi Live : GeoFP / Facebook / Kikourou
Liens vers les Forums : Forum spécial TOE / Forum Kikourou / Forum UFO



3 commentaires:

  1. Très chouette ton récit Arnaud! A bientôt j'espère en meilleure forme! ;-)

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  2. Salut Arnaud, c'est philippe, le copain de Jean-Michel. Je suis vraiment impressionné par ton récit et admiratif devant cette performance. Tout mes respects et a bientôt a Dijon.

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  3. excellent commentaire Arnaud, rassure toi, j'ai vécus les même hallucinations que toi sur le TOE. Félicitation pour ta perf. dans de si mauvaises conditions, ça n'a toujours été le "pied", !!, CHAPEAU. Pour ma part , j'ai fais le TOE en "rando-course" respectant au mieux une petite marge sur les B.H., et en faisant environ 400 photos, et une arrivé pas "fracassée" me projetant + pour le TOR des Géants 2012. Je te convie a mon blog et picasa pour les photos, et aussi RAIDLIGHT. A+ LA HAUT. http://picasaweb.google.com/112649232613852119207
    votre blog (http://herve.friquet.over-blog.fr).

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